Message de Noël 2015 de Son Excellence, Évêque de Charioupolis,Vicaire Patriarcal et Locum-tenens
Chers Révérends Pères, frères et sœurs,
Nous entrons dans la période préparatoire de Noël, le jeûne de l’Avent est déjà commencé, aussi sommes-nous orientés maintenant vers la célébration d’un événement qui a changé le cours du monde : la naissance de Dieu selon la chair. Poser une telle affirmation ne relève que de la foi et non de la rationalité. Celui qui la pose fait un choix, engage sa vie tout entière.
Or le Christ ne naît ni à Rome ni à Athènes. Il n’a choisi ni le pouvoir ni la richesse. Il n’a même pas choisi Jérusalem, la « Ville » où réside la présence de Dieu dans le Temple. Le lieu qui a entendu la première respiration du Dieu fait homme, c’est l’humble grotte de Bethléem. De même le choix du Christ ayant fait de nous des citoyens de Bethléem, nous devons faire nôtres l’humilité et la pauvreté de la grotte. Dieu a fait de cette bourgade méprisée et inconnue des hommes le lieu par excellence de sa révélation. Il a choisi ce qui n’était rien, ce qui était pauvre, ce qui était vraiment humain pour dire aux hommes que Lui, le Dieu Créateur, voulait aussi être comme l’homme, vivre avec lui, assumer toute l’angoisse, la pauvreté, la tragédie de l’homme, du petit homme que nous sommes tous. Noël c’est cette grotte, cette paille, ces humbles animaux et deux être pauvres mais pleins de confiance qui regardent cet enfant que les anges proclament comme : « un Sauveur vous est né ».
Car la naissance de Jésus à Bethléem n’est pas qu’un événement historique, perdu au fin fond de l’histoire, et qui ne me concernerait pas, moi l’homme du vingt-et-unième siècle. Le message de Noël ne s’adresse pas à l’humanité en général (qui comme telle n’est rien) mais il s’adresse à chaque homme en particulier, comme personne. Il atteint chaque âme, d’une manière unique, exceptionnelle. C’est à moi que l’on dit « Voici que je vous annonce une grande joie… aujourd’hui, il vous est né un Sauveur » (Luc 2, 10-12). C’est à chacun de nous que cette joie est annoncée. C’est pour moi qu’un Sauveur est né. Noël est pour chaque homme un don qu’il faut savoir accueillir et recevoir avec foi et reconnaissance.
La Nativité du Christ dans la simplicité de la grotte et de la crèche déclare avant même toute parole que Dieu veut être compté parmi les plus pauvres, parmi les plus humbles de la terre. On le trouvera donc parmi les déshérités de ce monde leur nombre ne cesse de s’accroître, les malades, les prisonniers, les pêcheurs et toute âme souffrante. Le vrai chrétien ne désire qu’une chose, être pauvre avec Jésus, plutôt qu’être riche sans Jésus. Il préfère habiter dans la grotte avec Jésus, Marie et Joseph, plutôt que dans une hôtellerie ou il n’y aura pas de place pour lui s’il dit qui Il est. Aussi, selon la parole de Jésus enseignant ses disciples, quiconque l’aimera comme Maître doit savoir qu’il n’a pas de place en ce monde car : « le Fils de l’homme n’a pas ou reposer sa tête » (Luc 9,58).
La Nativité du Christ, c’est la fête du corps mystique de tous les baptisés, car c’est par l’Incarnation que les hommes sont devenus membres du Christ. Saint Paul avait bien compris cela lorsqu’il écrivait aux Corinthiens : « Vous êtes le Corps du Christ, et membres chacun pour sa part » (Cor. 1, 12-17). Aussi nous croyons qu’avec l’Incarnation a commencé dans la chair humaine, en Jésus-Christ et les hommes, une union ineffable qui dépasse tout entendement. Car au-delà de l’événement historique qui se produit à Bethléem et par lequel le Fils de Dieu revêt un corps humain visible, un autre événement se produit et celui-là intéresse la race humaine tout entière : Dieu, en s’incarnant, épouse et revêt la nature humaine dont nous sommes participants et crée entre lui et nous une relation qui, sans cesser d’être celle de Créateur à créature, est aussi celle du corps aux membres. Il y a union des deux natures sans confusion. Noël nous permet ainsi de prendre plus profondément conscience de ce qu’est notre propre nature : une nature humaine, régénérée par Jésus-Christ comme le souligne saint Léon-le-Grand : « Reconnais, ô Chrétien, ta dignité et, admis à partager la nature divine, ne reviens pas à ton ancienne bassesse par une manière de vivre dégénérée. Souviens-toi de quelle tête et de quel corps tu es membre ». (Homélie pour la Nativité).
Ainsi, que la Parole de Dieu devienne donc chair en nous, ce lieu créé pour son accueil, qu’elle entre dans notre être et le transforme. Que la force de cette parole passe de l’extérieur à l’intérieur dans nos membres et que la loi de l’Esprit l’emporte sur la loi de la chair. La Nativité du Christ n’aura pour nous un sens réel que si notre propre chair devient transformée, mue et dominée par la Parole faite chair.
À tous sainte fête de la Nativité.
+ Jean, Évêque de Charioupolis, Vicaire Patriarcal et Locum-tenens
Paris, le 23 décembre 2015